Sutras – Kassapa Sutta

Kassapa Sutta
Sur la production conditionnée

Ainsi ai-je entendu : Une fois, le Bhâgavat séjournait à Kalandakanivapa dans le parc des Bambous, près de la ville de Rajagaha. Un jour, le Bhâgavat, s’étant habillé de bon matin, prit son bol et sa robe monastique, puis pénetra dans la ville de Rajagaha pour sa tournée d’aumône. A ce moment-là, un ascète nu appelé Kassapa vit de loin le Bhâgavat qui approchait. L’ayant vu, l’ascète Kassapa s’approcha du Bhâgavat et échangea avec lui des compliments de politesse et des paroles de courtoisie, puis se tint debout à l’écart sur un côté.

Se tenant debout à l’écart sur un côté, l’ascète nu Kassapa dit : « Si le vénérable Gotama nous le permet, s’il veut nous donner l’occasion d’écouter sa réponse, nous voulons l’interroger sur un certain point.

« Le Bhâgavat dit : « Ce n’est pas le moment pour questionner, ô Kassapa, nous sommes parmi les maisons. »

L’ascète nu Kassapa dit pour la deuxième fois : « Si le vénérable Gotama nous le permet, s’il veut nous donner l’occasion d’écouter sa réponse, nous voulons l’interroger sur un certain point. »

Le Bhâgavat dit : « Ce n’est pas le moment pour questionner, ô Kassapa, nous sommes parmi les maisons. »

L’ascète nu Kassapa dit pour la troisième fois : « Si le vénérable Gotama nous le permet, s’il veut nous donner l’occasion d’écouter sa réponse, nous voulons l’interroger sur un certain point. »

Le Bhâgavat dit : « Ce n’est pas le moment pour questionner, ô Kassapa, nous sommes parmi les maisons. »

Lorsque cela eut été dit par le Bhâgavat, l’ascète nu Kassapa persista : « Ce n’est pas une grande chose que nous voulons vous demander, ô vénérable Gotama. »

Enfin, le Bhâgavat dit : « Demandez alors, ô Kassapa, ce que vous voulez. »

L’ascète nu Kassapa demanda : « La souffrance (dukkha – ce mot a le double sens de souffrance et d’insatisfaction) de l’individu, ô vénérable Gotama, est- elle quelque chose de créé par lui-même ? »

-« Ce n’est pas comme cela qu’elle se produit, ô Kassapa », dit le Bhâgavat.

-« La souffrance (dukkha) de l’individu, ô vénérable Gotama, estelle quelque chose de créé par quelqu’un d’autre ? »

-« Ce n’est pas comme cela qu’elle se produit, ô Kassapa « , dit le Bhâgavat.

-« Si la souffrance (dukkha) de l’individu n’est pas quelque chose de créé par lui-même, si la souffrance (dukkha) de l’individu n’est pas quelque chose de créé par quelqu’un d’autre, ô vénérable Gotama, la souffrance (dukkha) de l’individu est-elle une chose apparue par hasard ? »

-« Ce n’est pas comme cela qu’elle se produit, ô Kassapa », dit le Bhâgavat.

-« La souffrance (dukkha) de l’individu, ô vénérable Gotama, est- elle une chose non existante ? »

-« Si, ô Kassapa, la souffrance (dukkha) de l’individu n’est pas une chose non existante, la souffrance (dukkha) de l’individu est donc une chose existante. »

-« Peut-être, le vénérable Gotama ne connaît-il pas la souffrance (dukkha) de l’individu, ne voit-il pas la souffrance (dukkha) de l’individu ? »

-« Non, ô Kassapa, je ne suis pas quelqu’un qui ne connaît pas la souffrance (dukkha) de l’individu. Je suis quelqu’un qui connaît la souffrance (dukkha) de l’individu. Je suis quelqu’un qui voit la souffrance (dukkha) de l’individu. »

-« Comment cela peut être alors, ô vénérable Gotama ? Lorsque j’ai demandé si la souffrance (dukkha) de l’individu avait été créée par lui-même, vous m’avez répondu en disant « Ce n’est pas comme cela qu’elle se produit ». »

-« Lorsque j’ai demandé si la souffrance (dukkha) de l’individu avait été créée par quelqu’un d’autre, vous m’avez répondu en disant « Ce n’est pas comme cela qu’elle se produit ». »

-« Lorsque j’ai demandé si la souffrance (dukkha) de l’individu se produisait par hasard, vous m’avez répondu en disant « Ce n’est pas comme cela qu’elle se produit ». »

-« Lorsque j’ai demandé si la souffrance (dukkha) de l’individu était une chose non existante, vous m’avez répondu en disant  » La souffrance (dukkha) de l’individu n’est pas une chose non existante. La souffrance (dukkha) de l’individu est une chose existante ». »

-« Lorsque j’ai demandé si le vénérable Gotama ne connaissait pas et ne voyait pas la souffrance (dukkha), vous m’avez répondu en disant  » Je ne suis pas quelqu’un qui ne connaît pas la souffrance (dukkha) de l’individu. Je suis quelqu’un qui connaît la souffrance (dukkha). Je suis quelqu’un qui voit la souffrance (dukkha) ».

-« Dites-moi donc, ô vénérable Gotama, comment se produit la souffrance (dukkha) ? Expliquez-moi, ô vénérable Gotama, comment se produit la souffrance (dukkha) ? »

Le Bhâgavat répondit : « Lorsque l’on dit que l’individu fait des actions et que le même individu reçoit leurs résultats – comme vous l’avez dit au début : « La souffrance (dukkha) de l’individu est créée par lui-même  » ; une telle affirmation se réduit à la theorie éternaliste. »

-« Lorsqu’on dit qu’un individu fait des actions et qu’un autre obtient leurs résultats, c’est-à-dire l’opinion selon laquelle on souffre à cause de la faute d’un autre, une telle affirmation se réduit à la théorie annahilationiste. »

– « Dans ce cas, ô Kassapa, le Tathagata enseigne la doctrine sans aller à ces deux extrêmes, mais selon la voie du milieu, selon laquelle : conditionnées par l’ignorance se produisent les formations mentales ; conditionnée par les formations mentales se produit la conscience ; conditionnés par la conscience se produisent des phénomènes psychiques et des phénomènes physiques ; conditionnées par les phénomènes psychiques et les phénomènes physiques se produisent les six facultés ; conditionné par les six facultés se produit le contact (sensoriel et mental) ; conditionnée par le contact (sensoriel et mental) se produit la sensation ; conditionné par la sensation se produit le désir ; conditionnée par le désir se produit la saisie ; conditionné par la saisie se produit le processus du devenir, conditionnée par le processus du devenir se produit la naissance ; conditionnés par la naissance se produisent la décrépitude, la mort, les lamentations, les peines, les douleurs, les chagrins, les désespoirs. De cette façon se produit ce monceau de souffrances (dukkha).

Cependant, par la cessation complète de l’ignorance, les formations mentales cessent ; par la cessation complète des formations mentales, la conscience cesse ; par la cessation complète de la conscience, les phénomènes psychiques et les phénomènes physiques cessent ; par la cessation complète des phénomènes psychiques et des phénomènes physiques, les six facultés cessent ; par la cessation complète des six facultés, le contact cesse ; par la cessation complète du contact, la sensation cesse ; par la cessation complète de la sensation, le désir cesse ; par la cessation complète du désir, le processus du devenir cesse ; par la cessation complète du processus du devenir, la naissance cesse ; par la cessation complète de la naissance, la décrépitude, la mort, les lamentations, les peines, les douleurs, les chagrins, les désespoirs cessent. Telle est la cessation complète de tout ce monceau de souffrances (dukkha).

Cela étant dit, l’ascète nu Kassapa dit au Bhâgavat : « Merveilleux, ô Vénérable, merveilleux, ô Vénérable. C’est vraiment, ô Vénérable, comme si l’on redressait ce qui a été renversé,  découvrait ce qui a été caché, montrait le chemin à l’égaré ou apportait une lampe dans l’obscurité en pensant: « Que ceux qui ont des yeux voient les formes « , de même le Bhâgavat a rendu claire la doctrine de maintes façons. »

Je prends donc refuge dans le Bhâgavat, dans l’enseignement et dans la communauté. Puissé-je obtenir l’ordination mineure et l’ordination majeure auprès du Bhâgavat.

Le Bhâgavat dit : Ô Kassapa, si quelqu’un qui était d’abord un adepte d’une autre religion veut obtenir l’ordination mineure et l’ordination majeure ici, dans cette doctrine et dans cette discipline, il lui faut passer une période de probation de quatre mois. Lorsqu’il a passé cette période de probation, à la fin des quatre mois, les bikkhus contents de lui, lui donneront délibérément l’ordination mineure et l’ordination majeure afin de le faire bikkhu. Néanmoins, je constate une différence entre les individus. »

L’ascète nu Kassapa dit : « Ô Bhâgavat, si quelqu’un qui était d’abord un adepte d’une autre religion veut obtenir l’ordination mineure et l’ordination majeure ici, dans cette doctrine et dans cette discipline, s’il passe une période de probation de quatre mois et si, lorsqu’il a passé cette période de probation, à la fin des quatre mois, les bikkhus contents de lui, lui donnent délibérément l’ordination mineure et l’ordination majeure afin de le faire bikkhu, je suis prêt, ô Bhâgavat, à passer une période de probation, même de quatre ans. Après avoir passé ainsi une période de probation, à la fin des quatre ans, que les bikkhus contents de moi me donnent délibérément l’ordination mineure et l’ordination majeure. »

Ainsi, l’ascète nu Kassapa obtint auprès du Bhâgavat l’ordination mineure et l’ordination majeure. Peu de temps après son ordination majeure, l’Ayasmanta Kassapa, demeurant seul, retiré, vigilant, ardent, résolu, parvint rapidement à ce but pour la réalisation duquel les fils de noble famille quittent leur foyer pour la vie religieuse ; cet incomparable but de la Conduite parfaite, il le réalisa dans cette vie même. Il compris : « Toute naissance nouvelle est anéantie. La conduite parfaite est vécue. Ce qui doit être achevé est achevé, plus rien ne demeure à accomplir. »

Sources: Compilation proposée par Gilles PRIN
Ce travail qui nous permet d’accéder aux textes en français est un ensemble de sutras parmi les plus importants afin de pouvoir les étudier sans recourir à plusieurs livres. Merci Gilles pour ce partage.